Je pense que cette version-ci est un peu moins dark, vu que j'avais pas mal de tendances suicidaires (en tout cas pour mes personnages) à cette époque-là... Il me semblait donc logique de -presque- tuer mes protagonistes dès la première ou deuxième page...
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Ce monsieur a donc gentiment accepté de lire mon prologue de la précédente version, qui pour petit rappel, consistait à ce que mon héroïne, Plume, se jette du haut d'un pont dans un monde légèrement post-apocalyptique parce qu'elle se retrouvait seule survivante... Je vous accorde qu'il y avait plus gai comme début...
Bref ! Après sa lecture de l'extrait, le commentaire de J.-J. Julaud m'a assez marqué... Comme ça fait un petit moment qu'il me l'a dit et que je ne l'avais pas noté (idiote...), je ne m'en rappelle plus au mot près, mais en gros, il m'a dit que le suicide n'était pas une solution et que ce n'était pas très gai... Alors certes, il n'a pas lu la suite donc il ne savait pas qu'en fait elle changeait juste de dimension, mais je pense qu'il a surtout dû penser que j'étais dépressive avec des tendances suicidaires... Enfin bref, je me suis dit que je pouvais quand même offrir mieux à ma pauvre petite Plume qui est un personnage que j'aime quand même bien...
Voici donc, si je puis dire, sa renaissance ou une nouvelle chance pour bien se "lancer dans la vie"...
Trêve de blablatage, et place au texte !
_Eh, Plume ! Ouvre, je crois que j'en ai trouvé un !
_On a pas idée de déranger les gens
qui mangent...grommela l'intéressée. De quoi tu parles encore, le
dingo ?
_Fais pas ta chieuse, ouvre la porte !
_J'te jure...
La jeune fille écarta
une fourchetée de sole de sa bouche. Il avait intérêt à avoir une
sacrée bonne raison pour venir la déranger alors qu'elle venait de
se mettre à table. Elle se leva de mauvaise grâce, et alla ouvrir
la porte.
Simon s'engouffra dans
la petite maison dès que la porte fut ouverte, et la claqua
aussitôt, prenant son amie de vitesse. D'ordinaire, du haut de ses
dix-neuf ans, le jeune homme était de nature calme, et, à moins de
bien le connaître il était difficile de deviner qu'il put posséder
une quelconque énergie. Il avançait toujours lentement et semblait
se promener en tout lieu, il élevait très rarement la voix et ne
prenait presque rien au sérieux. Ses cheveux blonds foncés étaient
aléatoirement dressés sur le haut de son crâne et auraient pu
évoquer un perchoir à oiseaux comme Plume en voyait derrière les
barreaux de leurs cages dans les alcôves des Protecteurs. Seuls ses
deux yeux gris-verts laissaient transparaître une certaine énergie
et s'animaient lorsqu'il observait avec intérêt une machine étrange
ou lisait un vieux livre qu'il avait réussi à dénicher au marché
noir. Simon passait donc le plus clair de son temps le nez dans ses
livres, et ne sortait de chez lui que pour en trouver d'autres ou
mener personnellement des recherches. Son teint pâle et son corps
frêle ressemblaient fort à tous ceux qu'arboraient les habitants du
Tunnel. Ainsi son activité soudaine et cette voix qui se cassait
parce qu'il criait fort était particulièrement inhabituels chez lui
et attisèrent tout de suite la curiosité de Plume.
Elle ne parvenait pas à
se rappeler des recherches qu'il menait en ce moment. Il avait bien
tenté de lui expliquer de nombreuses fois ce à quoi il vouait le
temps et le peu d'énergie qu'il possédait, mais les formules
compliquées qu'il lui exposait n'évoquait rien pour la jeune fille
qui se contentait de vivre simplement. Il lui avait appris à lire
lorsqu'ils étaient plus jeunes et bien qu'elle ne consacrait pas
autant de temps que lui à des occupations intellectuelles, elle
pouvait se vanter d'être l'une des personnes les plus cultivées du
Quartier. L'école étant bien trop chère et inaccessible pour les
pauvres habitants si éloignés de la Capitale et de sa richesse
culturelle et financière, enterrés sous terre comme pour cacher
toute la misère de ce monde aux habitants de la Surface. Ils
devaient se contenter de maigres savoirs et d'informations que les
Protecteurs laissaient échapper au compte-gouttes, parfois avec des
mois ou des années de retard. Le savoir était une chose précieuse
et rare, qui se transmettait d'une génération à une autre.
Toutefois, son ami se
lançait dans tant d'histoires et de recherches à la fois qu'il
était pratiquement impossible de les suivre toutes, ou d'avoir une
conversation construite avec lui tant les idées se bousculaient dans
sa tête et orientaient la conversation dans des sens très
différents, la faisant passer par des sujets qui ne semblaient avoir
aucun lien commun pour les non-initiés. Mais Plume connaissait Simon
depuis qu'elle était petite, ils avaient grandis ensemble dans le
même Quartier et ne se quittaient qu'assez rarement. Elle possédait
donc une sorte de décodeur qui lui permettait, en règle général,
de suivre les grandes lignes de sa réflexion et de décrypter les
lignes et les courbes plus ou moins aléatoires qui composaient son
écriture, quand d'autres n'auraient vu qu'un gribouillage d'enfant.
Elle savait également se montrer patiente lorsqu'il parlait très
lentement comme il le faisait d'ordinaire, mais ce jour-là, les mots
sortaient de la bouche de Simon comme les trains qu'ils sentaient
filer au-dessus de leurs têtes.
_Alors qu'est-ce que
tu...
_Tu es seule chez toi ?
La coupa-t-il.
_Oui, mais enfin
qu'...tenta-t-elle.
_Tant mieux. Il ne faut
pas que d'autres voient ça...
Et Simon, comme à son
habitude, fit comme chez lui et commença à fermer un à un tous les
volets, actionna les cinq serrures de la porte de Plume et, au
passage, attrapa la fourchette de la jeune fille et enfourna le bout
de sole.
_Délicieux ! Tu
cuisines toujours aussi bien !
_Espèce de...
Elle voulut le frapper à
l'arrière du crâne pour le punir, mais Simon se baissa juste avant
que la main de Plume n'arrive au niveau de sa tête. Ses sens étaient
comme exacerbés tant il était plongé dans les pensées
qu'accompagnaient cette nouvelle qu'il venait lui annoncer. Plume,
l'estomac vide, se retrouva accoudée à la table de sa cuisine,
emportée par l'élan qu'elle avait donné à son coup manqué.
_Bien essayé !
Commenta-t-il tout en tournant la poignée de la dernière fenêtre
encore ouverte dans la salle.
Il se pencha au dehors
et tourna la tête à droite et gauche pour vérifier que personne
n'avait une attitude louche dans la rue. Apparemment satisfait, il
attrapa les deux battants en bois et les referma dans un claquement.
Il vint alors s'asseoir sur la chaise qu'occupait la jeune fille
quelques minutes plus tôt, poussa l'assiette de poisson encore
fumant du revers de la main et y installa à la place une petite
bourse de tissu bleu roi. Il posa alors ses deux mains à plat sur la
table et regarda son amie qui s'asseyait en face de lui, les yeux
rivés sur la bourse.
_Qu'est-ce que c'est,
Simon ?
Elle craignait le pire.
La bourse était d'une couleur particulière. Bleu roi. Une couleur
rare dans la région. Une couleur interdite en réalité. Seuls
certaines personnes avaient assez de pouvoir ou d'influence pour
avoir le droit de l'utiliser. Comme son nom l'indiquait, il
s'agissait d'une couleur royale. Elle planta ses yeux gris dans ceux
de Simon. Elle avait peur de savoir où il avait pu dénicher cette
bourse, mais elle avait encore plus peur de ce qu'elle pouvait
contenir. Elle répéta sa question, en osant à peine bouger.
_Ça, Plume, c'est la clé
de notre liberté.
Voili voilou, j'espère donc que ça vous aura plu...
Sur ce, ciao les gens !